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caire à raison de mille francs par an. Pendant deux ans cette pension ne lui fut pas payée. Il ne s’en plaignait pas, trop heureux que la souveraine eût bien voulu « acheter sa boutique et lui laisser ses outils ». Mais cet oubli était volontaire. Sous couleur d’en éviter le retour, l’impératrice lui fit verser cinquante mille francs, le prix de cette pension pendant cinquante ans.

Diderot sentait bien la nécessité d’aller la remercier d’aussi généreux procédés. Il l’écrivait à Sophie : « Si je ne veux pas être ingrat envers ma bienfaitrice, me voilà presque forcé à un voyage de sept à huit cents lieues ; si je ne fais pas ce voyage, je serai mal avec moi-même, mal avec elle, peut-être. »

Mais il aime. Il ne veut pas partir si loin, si longtemps. En 1767, il l’avoue au sculpteur Falconet qui, de Pétersbourg, ne cesse de l’appeler. « J’ai une amie ; je suis lié par le sentiment le plus fort et le plus doux… » On a lu plus haut cet ardent couplet, il imagine même que Falconet le montrera à la souveraine. « Eh bien, qu’y verra l’impératrice ? écrit-il à Sophie. Que j’aime, que j’aime à la folie,