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La faute n’en fut peut-être ni à l’un ni à l’autre, mais à la vie : le bonheur demande un apprentissage que n’avait pas fait Corbière. Un homme qui a connu profondément l’auteur des Amours Jaunes, son cousin Pol Kalig, l’a défini « un tendre comprimé ». Il y a sans doute des compressions trop violentes et trop longues après lesquelles le cœur n’a plus la force de se détendre ; le pli est pris : ce fut toute l’histoire de Corbière. Il a 27 ans au moment où nous voici (1872) ; sa disgrâce personnelle et la solitude ont encore développé et presque poussé au paroxysme les instincts anarchiques qui sommeillaient en lui comme au fond de tous les Celtes ; la révolte est devenue son état normal ; la raillerie et la pose lui ont fait une seconde nature ; il en est arrivé au point de cultiver sa laideur comme une originalité. Quelle forme prendra l’amour chez ce malade ? On le devine assez et qu’incapable d’aimer simplement, il cherchera — et trouvera — toutes les raisons de se déchirer et de déchirer celle qu’il aime ; il lui supposera des calculs d’intérêt, de la compassion, du sadisme, tout, excepté un sentiment sincère, nu et franc ; il saura qu’il est injuste ; il conviendra de son humeur rebourse :