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SAINT TUPETU
de
TU-PE-TU


C’est au pays de Léon. — Est une petite chapelle à saint Tupetu. (En breton : D’un côté ou de l’autre.)

Une fois l’an, les croyants — fatalistes chrétiens — s’y rendent en pèlerinage, afin d’obtenir, par l’entremise du Saint, le dénoûment fatal de toute affaire nouée : la délivrance d’un malade tenace ou d’une vache pleine ; ou, tout au moins, quelque signe de l’avenir : tel que c’est écrit là-haut. — Puisque cela doit être, autant que cela soit de suite… d’un côté ou de l’autre — Tu-pe-tu.

L’oracle fonctionne pendant la grand’messe : l’officiant fait faire, pour chacun, un tour à la Roulette-de-chance, grand cercle en bois fixé à la voûte et manœuvré par une longue corde que Tupetu tient lui-même dans sa main de granit. La roue, garnie de clochettes, tourne en carillonnant ; son point d’arrêt présage l’arrêt du destin : — D’un côté ou de l’autre.

Et chacun s’en va comme il est venu, quitte à revenir l’an prochain… Tu-pe-tu finit fatalement par avoir son effet.



Il est, dans la vieille Armorique,
Un saint — des saints le plus pointu —
Pointu comme un clocher gothique
Et comme son nom : Tupetu.