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ſe paſſe dans le cœur de leur héros. Vous prétendez qu’il ne penſoit pas un mot de ce qu’il diſoit, lorſqu’il prenoit le parti des mœurs contre les lettres, & vous fondez cette opinion sur une anecdote que vous rapportez en ces termes : « Quel parti prendrez-vous, dit un homme célèbre à Rouſſeau, qui vouloit compoſer pour l’academie de Dijon ? Celui des lettres, dit Rouſſeau. Non, lui répondit l’homme de lettres célèbre, c’eſt le pont aux ânes, prenez le parti contraire, & vous verrez quel bruit vous ferez. »

D’abord que fait à la queſtion l’opinion prétendue d’un auteur lorſqu’il donne des raiſons ? Mais comment ne vous êtes-vous pas apperçu que cette anecdote, telle que vous la rapportez, est du nombre de celles qu’on laiſſe tomber malicieuſement pour examiner ceux qui les ramaſſent ? Ne voyez-vous pas qu’elle intéreſſe encore plus l’homme célèbre que vous déſignez, qui n’eut jamais dit le pont aux ânes & le bruit que vous ferez ?

Rouſſeau étoit à cet égard d’une opinion bien contraire à la vôtre, & ſur cet article ſon ſuffrage doit être de quelque poids. Il prétendoit que tous ſes ouvrages étoient con-