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ſes yeux paroiſſoient voir tout à-la-fois ; mais dans le fait, ils ne voyoient rien. Il ſe retournoit ſur ſa chaiſe & paſſoit le bras par-deſſus le doſſier. Ce bras, ainſi ſuſpendu, avoit un mouvement accéléré comme celui du balancier d’une pendule ; & je fis cette remarque plus de quatre ans avant ſa mort ; de façon que j’ai eu tout le temps de l’obſerver. Lorsque je lui voyois prendre cette poſture à mon arrivée, j’avois le cœur ulcéré, & je m’attendois aux propos les plus extravagans ; jamais je n’ai été trompé dans mon attente. C’est dans une de ces ſituations affligeantes qu’il me parla de la mort de Louis XV ; anecdote que Duſaulx vient de publier par ſa correſpondance. Voyant ſes longs ſoupirs & toutes les apparences des regrets les plus amers, je lui témoignai mon étonnement. D’après vos principes connus en morale, lui dis-je, il me ſemble que ſous tous les rapports, ſoit comme père de famille, ſoit comme roi, Louis XV ne devroit pas vous intéreſſer à ce point ; ſes mœurs & ſa coupable inſouciance n’ont produit que du mal. Vous n’appercevez pas, me dit-il, les conſéquences de cette mort à mon égard particulier. Pour tous, la mort de ce prince