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la France, ou à tous ceux dont la foi et les principes furent si étrangement traités par les ineptes jésuites, qui dirigeaient la conscience de Louis XIV. On choisit pour calomnier la foi protestante le moment où plusieurs des plus grands génies qui honorent l’humanité en faisaient profession ouverte, et donnaient à leurs immortels résultats scientifiques la couleur d’une piété qui comprenait à la fois les lois et l’auteur de la nature. C’était le moment où Newton publiait son livre des Principes de la philosophie naturelle (1687) et le calcul de l’infini en variant ces méditations sublimes par des commentaires sur les livres les plus difficiles du Nouveau Testament, et en partageant le même génie et la même dévotion avec un autre protestant, son digne rival et coreligionnaire, Leibnitz. C’était l’instant même où, par la plume habile autant que religieuse de Samuel Clarke et de Locke, les hautes vérités de l’existence divine recevaient ces démonstrations, dont la force et dont la clarté n’ont point été surpassées, comme aussi un illustre réfugié français, Jacques Abbadie, presqu’au moment même où la révocation fut signée, donna son traité, le plus solide ouvrage qu’on ait composé en faveur de la religion chrétienne. Il est remarquable que les livres de ces trois philosophes si éminemment pieux parurent en 1684, 1695 et 1704, précisément au milieu de la série innombrable des édits où Louis XIV et son secrétaire Phélypeaux attachaient des peines capitales à leur foi. À ce moment aussi Huyghens fut obligé, quoi qu’on en ait dit[1], à fuir Versailles et

  1. Les biographes, qui ont nié que les édits de révocation aient pu déterminer la retraite de Huyghens, en 1681, ont négligé de rapprocher quelques dates significatives. Le grand ouvrage Horologium oscillatorium, une des plus nobles productions des sciences exactes, dédié à Louis XIV, est de 1673 ;