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l’Écriture Sainte le dimanche, se contentant de s’abstenir de l’église romaine, se croyant glorieusement distingués et par là suffisamment autorisés à prendre la qualité de chrétiens réformés, mais vivant néanmoins dans l’irréligion, et n’ayant, la plupart, que trop souvent fléchi le genou devant l’idole ; que cependant au moment où même le souvenir d’avoir entendu la pure parole, qui ne vivait plus que dans la mémoire de quelques personnes vénérables, allait se perdre, Dieu leur avait envoyé un de ses serviteurs pour faire reluire son flambeau au milieu d’elles ; que les prédications de ce pasteur, Grenier de Barmont, avaient produit un fruit considérable qui se manifestait aux yeux de tous ; que cependant cette nouvelle vigne, si heureusement plantée dans un fonds, qui ne donnait aucun fruit, demandait à être cultivée, sous peine de périr, d’autant plus que « ces églises ne faisaient que de naître, » et que, avant cet événement « il ne restait aucun vestige d’ordre ecclésiastique dans ces contrées depuis près de soixante-sept années ; »[1] qu’en conséquence, ce serait leur donner la mort que de les laisser sans pasteur.

Ajoutons seulement que ces sentiments de si fervente piété déposaient contre les inquiétudes d’indifférence et de mort de ceux qui les manifestaient ; l’église, dont Clairac était le centre, n’oublia jamais les leçons de Grenier de Barmont, ni son courage

  1. Cependant la constance de ces communautés et le soin avec lequel elles avaient conservé leur foi en l’absence de tout sacerdoce, fait voir qu’il y eut dans l’histoire de la conscience des positions où le théorème de Bayle fut convaincu de fausseté : « Ôtez à l’Église ses assemblées publiques, son rituel, son formulaire, sa discipline, vous prenez le chemin de la perdre avant la troisième génération… Art. Bourignon. Bayle oubliait qu’il y a une chose qu’on ne peut ôter à l’Église, et qui remplace toutes ses pertes ; cette seule chose, c’est le cœur des fidèles.