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frappant. Il appartient à la Normandie, et rentre par conséquent dans le ressort du parlement de Rouen. Voici la prétention injuste qui donna lieu à un arrêt si juste. L’an 1780 décéda dans la paroisse du Cheffresne, vicomte de Gavray, au bailliage de Coutances, Jacques Duhamel, qui avait épousé Marie Talbot, tous deux nouveaux convertis, c’est-à-dire de la religion réformée. Sa femme resta veuve avec un jeune enfant. Ils s’étaient mariés devant un ministre du désert ; l’enfant avait été baptisé par un pasteur du même culte ; de sorte que ni le mariage ni l’enfant n’avaient la possession légale d’état. Des moyens plaidés devant le parlement de Rouen, par l’avocat de Marie Talbot, et que nous trouvons indiqués dans l’arrêt, il résulte, que dès que le mari fut mort, son frère, Jean Levillain Duhamel, prétendit que le mariage était nul, et que c’était à lui à se mettre en possession des biens. On objecta à cette prétention d’un cœur dénaturé qu’il avait lui-même reconnu et consenti le mariage de son frère ; qu’il avait écrit et signé le contrat ; qu’il avait même aidé à transporter les meubles et effets de la maison du père de la future à la maison conjugale ; qu’il avait donné tous ses soins au baptême de l’enfant qui en était issu, lequel il voulait maintenant faire passer pour bâtard ; qu’il était constant que le demandeur avait toujours reconnu la défenderesse pour femme légitime de Jacques Levil-

    à l’interprétation et à la justice des magistrats. Il permit de faire fléchir la rigueur précise de l’édit de révocation, ordonnant (art. viii) que tous les enfants de ceux de ladite religion prétendue réformée devaient être baptisés par les curés, sous peine de cinq cents livres d’amende. Cette inscription devant l’ordinaire constituait la légalité de l’État. Telle était évidemment la lettre précise de la loi. Mais l’article de 1698, que nous venons de citer, permettait de la modifier d’une manière presque illimitée dans les espèces, selon l’équité naturelle des juges.