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des églises du désert.

tières régies par des lois confuses, d’où dépendait cependant la validité des actes les plus importants de la vie civile de beaucoup de Français. « Enfin, dit Saint-Simon, il n’y avait que le roi qui pût s’interpréter soi-même dans ces diverses contradictions[1]. » Le régent, ennuyé de tous les embarras de procédure, et peut-être aussi troublé par un état de choses qui blessait son équité naturelle, en parla à son ami et confident intime Saint-Simon. Les conseils du duc furent loin de répondre aux équitables intentions de son maître. Philippe lui parla de la cruauté avec laquelle le feu roi avait traité les huguenots, de la faute de la révocation de l’édit de Nantes, du préjudice immense que l’État en avait souffert dans sa population, dans son commerce, dans les haines qu’il s’était attirées ; il appuya sur la situation d’appauvrissement et de ruine où Louis XIV avait laissé le royaume, et sur « le gain de peuple, d’arts, d’argent et de commerce » qui suivrait la rentrée des huguenots. Enfin il finit par proposer nettement leur rappel. C’était une mesure beaucoup trop hardie et trop forte pour que le régent pût s’y tenir. Aussi les malfaisantes remontrances de Saint-Simon ne tardèrent pas à le faire changer d’avis, ou au moins à lui faire oublier sa première idée. Profitant « de l’heureuse et sage timidité » de Philippe, le duc sut habilement accumuler devant lui tous les vieux sophismes et tous les fantômes surannés, qui avaient sans cesse présidé aux persécutions des protestants de France. Il représenta les guerres civiles dont les huguenots avaient été cause ; il se récria sur la position des sujets qui se donnaient le droit de ne l’être qu’en partie, qui prétendaient avoir des places de sûreté, des garnisons,

  1. Mém., ann. 1716.