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COMPAGNONNAGE. COMPTABILITE COMMERCIALE. 437 sont également enfants do, maitrc Jacques et pren- ni’iit le nom de Dévorants. Les Enfants du père Soubisc se composent des charpentiers, des couvreurs et des plâtriers. Ils ont tous un devoir, mais les enfants de maître Jacques et du prie Soubisc prennent seuls le nom de Compagnons du devoir. Les compagnons des différents ordres ont en général une mère. C’est ainsi que l’on appelle la maison où est le siège de la société. C’est là qu’ils se réunissent en assemblée mensuelle pour discu- ter les affaires d’intérêt général; l’assemblée est convoquée parle routeur. Chaque compagnon est à tour de rôle rouleur; c’est lui qui est chargé d’accueillir les nouveaux arrivants et de les em- baucher, d’accompagner les partants, et de vérifier s’ils ne laissent pas de dettes parmi les compa- gnons ou chez la mère. Le but vraiment utile des sociétés de compa- gnonnage est de procurer du travail aux compa- gnons sans ouvrage et de leur donner des secours quand ils tombent malades. Quand un compagnon arrive dans une ville, le rouleur le conduit chez le maître et l’embauche. S’il tombe malade, on lui porte des secours, on le soigne; dans quel- ques sociétés on lui fait dix sous par jour. Si un membre meurt, la société lui rend les derniers honneurs. Dans ces cérémonies , les compagnons portent des cannes ornées de rubans. Les trois grandes catégories de compagnons sont malheureusement ennemies les unes des au- tres, et il est arrivé souvent que leur rivalité a causé de sanglantes batailles. Ils attachent tous une importance singulière à la légende de leur fondateur; les Compagnons de liberté, dans une lettre qu’ils ont adressée à M. Agricol Perdiguier, à propos de son livre sur le campagnonnage, lui reprochent avec amertume d’avoir laissé croire que les Compagnons de liberté sont les auteurs du meurtre d’Hiram, architecte de Salomon. « Nous n’avions, disent-ils , jamais eu à soutenir une semblable accusation. » En 1807, les menuisiers et les serruriers, bles- sés de ce qu’on ne les faisait remonter qu’à l’an- née 570 après J.-C, refusèrent de signer un ta- bleau du rang que doivent prendre entre eux les compagnons du devoir. Toutes ces raisons pué- riles contribuent à entretenir des haines perpé- tuelles entre les diverses sociétés de compagnons. Ces haines que M. Agricol Perdiguier s’est tant efforcé de faire oublier, sont en partie effacées à Paris; mais elles ont quelquefois occasionné dans les départements de sanglants combats. Les gavots célèbrent encore par des chansons la victoire qu’ils ont remportée en 1730 dans la plaine de la Crau, où les compagnons de Salomon d’une part, et ceux de Jacques et de Soubise de l’autre, s’étaient donné rendez-vous. Un grand nombre de refrains, soit des enfants de Salomon, soit des compagnons du devoir, consacrent le souvenir de hauts faits de ce genre. Ce qui contribue le plus à entretenir ces rivali- tés si déplorables , c’est la persistance des com- pagnons dans leurs pratiques mystérieuses : ainsi un grand nombre d’entre eux hurlent, c’est-à- dire qu’ils poussent des cris bizarres en articulant des sons qu’eux seuls peuvent comprendre. D’au- tres, pour se reconnaître, topent. Quand deux compagnons se rencontrent sur une route, à une vingtaine de pas l’un de l’autre, ils s’arrêtent, prennent une pose et s’adressent à haute voix les demandes et réponses suivantes : Tope! — Tope ! — Quelle vocation? — Charpentier, et vous le pays? — Tailleur de pierre. — . Compagnon? — Oui, le pays, et vous? — Compagnon aussi. — ■ Alors ils se demandent à quel devoir ils appar- tiennent; s’ils l’ont partie de sociétés ennemies, ils ne veulent ni l’un ni l’autre céder le pas ; le plus souvent une rixe s’engage, dont les consé- quences sont quelquefois désastreuses. Il y a dans ces haines, dans ces mystères, quel- que chose qui n’est plus de notre temps. Le com- pagnonnage n’a plus sa raison d’être : ses pra- tiques secrètes et mystérieuses pouvaient être né- cessaires à une époque de moins grande sécurité; elles ne peuvent servir aujourd’hui qu’à cacher des projets plus ou moins dangereux. Le compagnon- nage doit donc se transformer et se confondre dans les nouvelles sociétés de secours mutuels, que l’on fonde depuis peu. On a fait surtout, depuis quel- ques années, des recherches suivies sur la meil- leure organisation possible des sociétés de secours. On s’occupe de dresser des tables de maladie et de mortalité pour les ouvriers des diverses profes- sions ; d’étudier les combinaisons administratives et financières qui peuvent assurer le succès des sociétés de prévoyance 1 . Les règles de l’organisa- tion de pareilles sociétés forment une véritable science ; il faut que les compagnons le compren- nent, qu’ils ne repoussent pas les avis des per- sonnes éclairées s’occupant de pareilles questions, et le compagnonnage, perdant son esprit de moyen âge pour revêtir l’esprit moderne , n’en acquerra que plus d’illustration. Léon Say. COMPTABILITÉ COMMERCIALE. Les règles de la comptabilité commerciale ne sont pas, abso- lument paiMant, une partie essentielle de l’écono- mie politique. Elles intéressent néanmoins à un si haut degré le commerce tout entier; elles sont d’une importance si grande pour le maintien du bon ordre, non-seulement dans les relations com- merciales, mais encore dans le maniement des finances publiques, où les procédés du commerce ont été appliqués, que nous avons cru devoir reproduire en son entier le fragment suivant du principal ouvrage de J.-B. Say, où ces règles sont exposées très clairement et avec une recti- tude parfaite. « La base de tous les comptes est un inventaire ou un bilan, c’est-à-dire un état de toutes les choses évaluables qu’on possède avec leur évalua- tion en une même marchandise , en un dénomi- nateur commun, en monnaie d’argent, en francs. Les créances, les sommes qui vous sont dues par d’autres particuliers, y figurent évaluées de même que toutes les autres propriétés. Les comptes que l’on tient régulièrement se continuent en ajoutant à ce premier fonds toutes les valeurs qui devien-

Un comité de propagation des sociétés de pré- 

voyance a été fondé dans le mois de novembre 1849; son bureau est composé de MM. Lanjuinais, président, d’Eichthal, trésorier ; Hubbard, secrétaire, et de MM. Cu- nin-Gridaine, Dussart, Hachette, de Mortemart, O. Ko- drigaes, de Watteville.