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grasse ;
Et ma voix en a plus de moelleux & de grâce.
Je lance aux plats fumants de longs regards amis ;
On comprend, & voilà que mon couvert est mis.

SILVIA.
J’entends ; & vous allez à Florence sans doute ?

ZANETTO.
Sans doute ? Non. Je vais par là ; mais, si la route
Se croise de chemins qui me semblent meilleurs,
Eh bien ! je prends le plus charmant & je vais ailleurs.
J’ai mon caprice pour seul guide, & je voyage
Comme la feuille morte & comme le nuage.
Je suis vraiment celui qui vient on ne sait d’où
Et qui n’a pas de but, le poète, le fou,
Avide seulement d’horizon & d’espace,
Celui qui suit au ciel les oiseaux, & qui passe.
On n’entend qu’une fois mes refrains familiers.
Je m’arrête un instant pour cueillir aux halliers
Des lianes en fleurs dont j’orne ma guitare,
Puis je repars. Je suis le voyageur bizarre
Que tous ont rencontré, léger de ses seize ans,
Dans le sentier nocturne où sont les vers luisants.
Quand il pleut, je me mets sous l’épaisse feuillée,
Et je sors, ruisselant, de la forêt