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ventre rasé et toute harnachée de pompons et de sonnailles, est beau comme un contrebandier des temps romantiques. A la bonne heure ! En voilà de la lumière, de la couleur et de la joie ! Grisé, enchanté, Félix Travel s’attarde à flâner parmi cette foule bruyante ; il se promène là pendant plus d’une heure, lentement, délicieusement, dans la bonne chaleur du soleil qui lui pique le dos et les reins. Il se sent toujours un peu faible, c’est vrai, mais jamais il n’a eu plus goût à la vie. Ce Midi, tout de même ! Mais c’est un miracle, une résurrection ! Mais il est en pleine convalescence ! Quel bonheur !

Pourtant, il a passé la nuit en wagon, il a sommeil, et lorsqu’il rentre à l’hôtel pour se jeter une heure ou deux sur son lit, le garçon lui présente une lettre que vient d’envoyer Mme de Pujade. Elle prie M. Félix Travel de venir dîner chez elle, le soir même, sans cérémonie ; elle sera flattée, dit-elle, de connaître l’auteur de la Sérénade et de la Nuit d’Étoiles, et heureuse de parler avec lui du docteur Damain, à qui elle doit la vie, etc., etc. Tout cela, dit en quelques lignes courtoises, un peu sèches, sur un papier à lettre orné d’une couronne comtale.