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doses énormes ! Si c’était trop,— ou pas assez ? Ce traitement par les bains glacés dont on parle tant, qui a fait des miracles, à ce qu’il paraît, pourquoi le docteur Forly n’en essaye-t-il pas ? Mme Bernard veut voir d’autres médecins, appeler au secours les célébrités, les grands guérisseurs.

Il en vient trois à la fois, enveloppés de lourdes pelisses, dans leurs coupés confortables. Et la mère en détresse veut voir luire l’éclair du génie dans leurs yeux fatigués, sur leurs faces mornes de savants ; elle veut prendre confiance dans la grosse rosette de leur boutonnière, dans leurs titres ronflants de professeurs et d’académiciens, dans leurs noms connus de toute la France. Mais, dès qu’ils sont en présence du malade, elle épie et découvre sur leurs visages cette légère moue, cette grimace presque imperceptible qu’elle connaît chez le docteur Forly et qui lui donne froid dans les os. Les médecins passent gravement au salon pour se consulter entre eux, et, derrière la porte fermée, elle écoute, raide d’angoisse, le murmure confus de leurs voix. Sainte Vierge ! si tout à l’heure ils pouvaient lui affirmer qu’Armand n’est pas en si grand péril, qu’ils répondent de sa vie ! Ah ! quelle joie ! A en mourir ! Mais non. Ils