Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/300

Cette page n’a pas encore été corrigée

passer de la présence d’Armand. Elle avait besoin sinon de le tenir sous ses yeux, du moins de le savoir à la maison, tout près d’elle. Elle souffrait de ses absences, pourtant assez courtes, puisqu’il n’allait au lycée que pour en suivre les cours, et parfois, prise d’un impérieux désir de le revoir une demi-heure plus tôt, elle demandait sa voiture et se faisait conduire à la porte de Louis-le-Grand. Elle arrivait là bien en avance, s’impatientait, jetait sur la porte du lycée des regards d’amoureuse venue la première au rendez-vous. Enfin, elle entendait le roulement de tambour annonçant la fin de la classe, et si l’enfant sortait un des derniers, elle en souffrait positivement, songeait presque à lui reprocher de ne pas avoir pressenti qu’elle était là. Vite, elle le faisait monter dans le coupé, l’étreignait pour le baiser au front, comme s’il fût revenu d’un long voyage, et pendant tout le temps du retour le retenait ainsi contre elle, avec un geste d’avare.

Quelquefois Armand sortait du lycée, riant et causant avec un camarade, et Mme Bernard, soudain inquiétée, posait à son fils vingt questions pressantes : « Comment s’appelle-t-il ? Qui est-il ? Que font ses parents ? Veux-tu vraiment en faire ton