Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/215

Cette page n’a pas encore été corrigée

Villa Médicis, offrait chez Foyot à quelques camarades d’atelier.

Michel — il allait avoir trente ans, et son deuil récent avait encore augmenté sa gravité naturelle — tomba au milieu d’une bande de tapageurs, tous plus jeunes que lui, aux allures de rapins, qui, après le chablis et les huîtres, étaient grisés déjà par leurs blagues et leurs éclats de rire. Au dessert, ces artistes, qui avaient tous dans l’esprit un idéal élevé ou tout au moins un goût délicat, rivalisèrent de cyniques propos ; et un grand diable de sculpteur ayant crié qu’il y avait, depuis quelques jours, de jolies « débutantes » dans un mauvais lieu du quartier Latin, à deux pas de là, la bête sensuelle qui dort au fond de chaque homme se réveilla tout à coup chez ces jeunes gens, et l’on se mit à hurler : « Allons chez Dolorès !... Allons voir ces dames ! »

Michel aurait bien voulu s’esquiver. Tant de brutalité lui répugnait, et il avait bu modérément. Pourtant, par faiblesse, pour faire comme tout le monde, craignant les railleries peut-être, il suivit les camarades.

— « Bah ! — se dit-il, — j’en serai quitte pour payer quelques bouteilles de bière. »