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en y réfléchissant, c’était peut-être une preuve de son innocence, — jamais Marguerite ne portait le moindre bijou. Le bracelet jadis acheté par moi avec l’argent du vol, et qu’elle avait tenu à restituer honnêtement au moment du procès, était le seul joyau qu’elle eût jamais possédé. Jusque-là, très pauvre fille, mais ayant horreur du faux, du « toc », comme elle disait avec un dégoût singulier, elle ne s’était jamais parée de la plus modeste bijouterie, et ses oreilles n’étaient même pas percées. Le souvenir de cette dernière particularité me touchait profondément.

Parbleu ! je me rappelais quand même que, si je ne voyais point de bagues à ses doigts, je n’y retrouvais pas non plus, depuis quelque temps, les traces du travail. Je me disais bien aussi qu’elle pouvait avoir accepté des parures et ne pas les mettre pour venir me voir. Mais, ce jour-là, j’étais disposé à la bienveillance, je voulais me convaincre d’injustice, et, dans les mille suppositions qui me traversaient l’esprit, je ne m’arrêtais qu’à celles qui pouvaient être favorables à Marguerite.

Elle arriva à l’heure exacte, selon son habitude, et moi, en l’apercevant de loin, à travers le grillage, je sentis pour la première fois se dissiper mes