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grillage qui nous séparait, afin que je pusse la toucher de mes lèvres. Elle m’obéit, et en baisant sa main je vis qu’il n’y avait plus de piqûres d’aiguilles au bout de ses doigts...

Mais la demie d’après onze heures vient de sonner à l’horloge de la prison.

Mon bout de cire sera bientôt consumé.

Hâtons-nous.

Si le temps ne me manquait pas, j’aurais eu pourtant une atroce satisfaction à analyser ici toutes les angoisses que j’ai souffertes et qui se peuvent résumer dans ces deux mots dont l’accouplement fait frémir : un prisonnier jaloux ! Oui ! j’aurais une joie de damné à décrire par le menu les supplices que m’infligea Marguerite, à chaque nouvelle visite. Il en est un, surtout... Oh ! celui-là, je veux le dire, car il fut le plus cruel de tous.

Ce jour-là, en attendant l’arrivée de ma maîtresse, j’avais essayé de me persuader que j’étais trop incrédule, qu’il n’était pas impossible, après tout, qu’une femme gagnât assez largement sa vie pour s’acheter quelques nippes. Un détail, même, qui m’était subitement revenu à la mémoire, m’avait presque rassuré. Jamais Marguerite, qui ne craignait pas de se montrer à moi en toilette neuve, —