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— Si tu étais capable d’attendre ma libération et de me rester fidèle ?...

— Je te le promets... je te le jure !

— Bah ! comment vivras-tu ?

— Je travaillerai.

— Toi, ma pauvre Marguerite ?

— J’ai appris pour être couturière... Tu verras. »

Elle revint huit jours après, ôta ses gants et me montra ses doigts marqués de piqûres d’aiguilles. Elle avait trouvé, me dit-elle, des « confections » à faire pour un magasin de nouveautés. Elle gagnait déjà quarante sous par jour, mais bientôt elle deviendrait plus habile, arriverait à trois francs.

— « On peut vivre avec ça, — ajouta-t-elle en souriant. Oh ! sans faire la noce, bien sûr... Mais je n’y pense guère, va !... Je ne tiens plus qu’à une chose, à présent... Faire plaisir à mon chéri. »

Ce nom « mon chéri », qu’elle me donnait autrefois avec tant d’indifférence, si banalement, comme elle l’avait donné, hélas ! à tous ses amants, fut prononcé par elle, ce jour-là, avec l’intonation la plus tendrement émue ; et les larmes m’en vinrent aux yeux.

Que m’importaient alors la captivité, la livrée d’infamie, l’ignoble