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Mais l’heure passe... A quoi bon raconter la tempête morale dans laquelle a sombré mon honnêteté ? A quoi bon dire le vol commis et mon horrible angoisse, devant le poteau des courses, en voyant accourir les deux chevaux furieusement fouettés par leurs jockeys, et en entendant la foule acclamer Sept-de-Pique, qui venait de battre Grain-de-Sel d’une longueur de tête ? On découvrit mon crime. Je fus arrêté, jugé, condamné, mis enfin dans cette prison où j’ai subi les pires tortures et d’où je ne sortirai que mort.

Oh ! oui, les pires tortures ! Pas celles du remords, je le répète, ni de la privation de la liberté, ni de la vie en commun avec des bandits. Oh ! de bien pires, de bien pires, celles de la jalousie !...

Je n’avais jamais souffert encore de ce cruel sentiment, et Marguerite, pendant les cinq mois que nous avions vécu ensemble, n’avait rien fait pour me l’inspirer. Apathique et casanière, elle restait seule au logis pendant toute la journée, — j’en avais des preuves, — et, le soir, quand nous sortions ensemble, pas une seule fois je n’avais surpris chez elle un de ces regards de complaisance que la plus honnête femme, même au bras de son mari, jette au premier passant venu qui a l’air