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verrai sa nuque et ses épaules émergeant de son corset de satin noir et son voluptueux sourire reflété dans l’armoire à glace !

Oui ! voilà ce que je puis avoir demain, après ces six mois de solitude, d’horrible solitude. Voilà ce que je puis avoir demain, si je veux. La liberté, le bonheur, l’amour !...

Eh bien, cela ne sera pas. Je me tuerai tout à l’heure, quand j’aurai noirci ces quelques feuillets où j’essaie de m’expliquer à moi-même la cause de mon impérieux besoin de mourir. Ah ! le gardien, qui, malgré le règlement, a bien voulu me vendre le rat de cave à la lueur duquel j’écris ces lignes, et qui, demain, quand il viendra pour me délivrer, me trouvera pendu à l’un de ces barreaux, raide, déjà froid, la face noire et la langue tirée, sera bien surpris, n’est-ce pas ? Les choses se passeront ainsi, pourtant. Je me pendrai à minuit.

Réfléchissons, tâchons de voir clair dans les sentiments qui m’agitent.

D’abord, il faut bien l’avouer, je n’ai aucun remords de ma mauvaise action. J’ai cependant commis un indigne abus de confiance, j’ai volé un homme qui était juste et bienveillant pour