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lorsque j’y pense, me relève à mes propres yeux et me paraît racheter toutes les impuretés de mon existence. O merveilles morales de l’amour innocent, de l’amour sans désir ! Je ne voulais, je n’espérais rien de cette enfant divine. Mon cœur débordait d’une joie ineffable à la seule pensée qu’elle existait, voilà tout ! et que je pouvais approcher d’elle, la voir et l’entendre. Quand je me suis dit qu’elle était une femme, qu’elle pourrait peut-être m’aimer, qu’il n’était pas impossible qu’un jour mes lèvres effleurassent son front, — oh ! rien de plus, — eh bien, moque-toi de moi, tant que tu voudras, mais tout d’abord cette idée m’a fait honte et j’en ai rougi. Lorsque je prenais congé d’elle et qu’elle me tendait timidement la main, cela me paraissait une faveur sans prix et dont j’étais indigne. La seule présence d’Elsa me jetait dans une extase pareille à celle que la prière doit procurer aux mystiques, créait autour de moi une atmosphère de rêve. Qu’elle soit à jamais bénie, l’enfant qui m’a fait vivre ainsi pendant quelque temps et près de qui je me suis senti si heureux, si doux et si pur !

« Un petit nombre de jeunes gens venaient chez Mme de Hansberg, et tous étaient des géants