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de passer sous-chef, et employait toutes ses soirées à copier du jargon technique : « Démonté et remonté la serrure... Donné du jeu à la gâche, etc., etc. »
Mais, pour le moment, il s’oubliait à bavarder avec sa femme et ses filles.
Gaîment, car tout allait à peu prés bien dans rhumble ménage. Un marchand de bons-dieux de la place Saint-Sulpice avait offert à l’aînée, la grande Fanny, l’artiste, celle dont les « anglaises » blondes faisaient rêver tous les rapins du Salon Carré, de lui payer cinquante francs son pastel d’après la Vierge au coussin vert. La seconde, Léontine, avait « pioché » toute la journée son Menuet de Boccherini. Quant à la grosse Louise, la cadette, elle ne pensait qu’à la coquetterie, décidément. Ne voilà-t-il pas qu’elle parlait — s’il y avait des gratifications au 15 août — de s’arranger une petite capote pareille à celle qu’elle avait vue chez la modiste de la rue du Bac !
« Louise, mon enfant, — s’écriait le père, — tu fais des chapeaux en Espagne ! » Et l’on riait.
Mais la maman pensait au sérieux, elle. Si le père obtenait une gratification, elle avait re-