été plus brillant que le mien, chef d’escadron dans un régiment d’artillerie caserné à l’École militaire. Depuis lors, nous nous sommes beaucoup vus. Nous avons le même âge : quarante-trois ans. La jolie moustache noire de Dulac est grise aujourd’hui, et la première apparition d’un rhumatisme goutteux l’a obligé, l’été dernier, à faire une saison à Contrexéville ; il se congestionne un peu et vieillit en rouge. Moi, je vieillis en jaune. Elle n’existe plus, cette pâleur romantique qui — je peux le dire à présent sans fatuité — a causé jadis quelques ravages à Lisbonne et à Vienne. De plus, j’ai l’estomac un peu fatigué par la cuisine internationale. Nous ne sommes plus jeunes ni l’un ni l’autre, il n’y a pas à dire mon cœur. C’est le moment où une amitié de derrière les fagots comme la nôtre devient rare et précieuse. Une ou deux fois par semaine, Dulac vient dîner en tête-à-tête avec moi, dans mon petit entresol de la rue de Mailly. Oh ! un dîner bien sage, où l’on se régale d’un joli poulet de grain rôti au bois et d’une délicate bouteille de vrai vin de Bordeaux, que la cuisinière a soin de faire tiédir sur le poêle de la salle à manger, une demi-heure avant de servir le potage. Enfin, après le café, —
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