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Et il les a copiées de sa main, publiées comme de lui, et le voilà presque passé grand homme !

C’est ainsi. Le misérable a vendu la dépouille de sa victime. Plagiat compliqué de meurtre et de vol. C’est la pire des infamies ! Mais, qui sait ? Si les morts s’occupent des vivants, Anna pardonne encore à Marius ; car elle l’aime pour l’éternité, et elle est heureuse de lui être encore bonne à quelque chose... Il se dit cela pour s’excuser, et il ne se trompe peut-être pas. Les cœurs aimants doivent conserver jusque dans l’autre vie leurs incroyables faiblesses.

D’ailleurs, les remords tourmentent-ils Marius ? Bah ! n’a-t-il pas assez de vanité pour se convaincre qu’inspirer un livre ou l’écrire, cela revient au même ?

Quoi qu’il en soit, Marius Cabannes a vitement profité de son triomphe. Il est devenu l’époux d’une riche héritière à qui les Lettres d’Amour avaient tourné la tête, et il donne aujourd’hui d’excellents dîners. Aussi, son ambition n’a-t-elle plus de limites. On assure même que, l’autre nuit, quelqu’un l’a reconnu, debout dans le clair de lune, au milieu du Pont des Arts, devant l’Institut, et