sifflé à Paris il y a une vingtaine d’années, deviendra un jour classique. César Maugé, homme à succès, n’aimant que le succès, murmura dédaigneusement le mot « raté », en apercevant au fauteuil le profil d’aigle déplumé du vieil homme de génie étriqué dans sa redingote de pauvre.
Les autres musiciens n’offraient pas des types bien remarquables, — pas plus le premier violon, avec sa cravate blanche en foulard et sa chevelure fougueuse de photographe, que la contre-basse, vieillard chauve et résigné, prisant avec bruit, ou que la flûte, gagiste de régiment, à dures moustaches de gendarme.
Un seul des exécutants intéressa l’observateur, dès le premier coup d’œil.
C’était l’alto, un tout jeune homme, — vingt ans à peine, — adorable visage d’éphèbe blond et rose, aux sombres yeux bleus, que ses longs cheveux ondulés et bouffants faisaient ressembler aux personnages des portraits de Bernardino Luini. Un véritable artiste, à coup sûr, et dont l’ardeur se trahissait rien que par la crispation de sa petite main maigre sur le manche de son instrument. Pauvrement, mais proprement vêtu, il se tenait assis avec modestie, son alto sur la cuisse, attendant