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sa toilette tapageuse, elle se mit à manger une, deux, trois pommes cuites, avec un appétit tout populaire.

En ce moment, un homme déjà vieux, mais grand, fort, et portant haut la tête, qui arrivait, en mâchonnant un gros cigare et les mains plongées dans les poches de son paletot, orné d’un large ruban rouge, passa tout près de l’actrice, la reconnut et partit d’un bruyant éclat de rire.

— « Comment, Sylvandire, tu aimes tant que cela les pommes cuites ! Toi, une actrice ! »

Elle se retourna et reconnut la barbe teinte et la face audacieuse du célèbre auteur dramatique César Maugé, du satirique amer et effronté, dont chaque pièce est un triomphe et un scandale, et qui s’est fait adorer de la société moderne comme un ruffian par une fille, en la cravachant.

— « Un souvenir d’enfance, mon cher maître, — répondit gaîment la grande coquette en faisant une révérence comique au pacha théâtral. — Cela me rappelle l’époque où je portais mes cheveux dans un filet de chenille rouge et où je logeais chez papa, qui était cordonnier rue Ménilmontant, et qui me fichait des calottes quand je ne rentrais du bal Favié que le lendemain à midi... On n’a pas