Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/100

Cette page n’a pas encore été corrigée

Pour que ces hommes du monde puissent être vêtus seulement d’un mince frac en plein Décembre, pour que ces femmes montrent leurs bras et leurs épaules, le calorifère répand dans la chambre la chaleur d’une matinée de printemps. Mais qui donc a fourni la houille ? Le damné du pays noir, l’ouvrier souterrain qui vit dans l’enfer des mines. — Combien la peau de cette jeune dame est blanche et fraîche pour émerger ainsi, victorieusement, de ce corsage de satin rose. Mais qui donc l’a tissé, ce satin ? L’araignée humaine de Lyon, le canut toujours à son métier dans les maisons lépreuses de la Croix-Rousse. — Elle porte à ses mignonnes oreilles deux admirables perles, la jeune dame. Quel orient ! Quelle transparence opaline ! Et presque sphériques ! La perle que Cléopâtre avala, après l’avoir fait dissoudre dans du vinaigre, et qui valait dix mille grands sesterces, n’était pas plus pure. Mais sait-elle, la jeune dame, que tout là-bas, à Ceylan, sur les bancs d’huîtres perlières d’Arippo et de Condatchy, les Indiens de la Compagnie des Indes plongent à douze brasses de profondeur, héroïquement, un pied dans le lourd étrier de pierre qui les entraîne au fond, un couteau