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petite, carrée, ayant seulement un rez-de-chaussée et un premier, avec des fenêtres symétriques, sans un ornement ni une moulure, très neuve et très triste.

C’était dans ce lieu banal et sans charme qu’Eugénie vivait avec l’autre ; et, à cette pensée, Gabriel se sentait plein d’amertume.

Eugénie avait déjà mis la clef dans la serrure.

« A demain ? » demanda le jeune homme d’une voix suppliante.

Elle ne s’était fait accompagner par lui que pour le supplier de ne plus la revoir ; mais, à présent, tout son courage l’avait abandonnée.

« A demain », répondit-elle en entr’ouvrant la lourde porte et en lui tendant sa main libre.

Il prit cette main qui s’offrait à lui ; mais tout à coup, spontanément, instinctivement, les deux jeunes gens tombèrent dans les bras l’un de l’autre, et les lèvres de Gabriel s’appuyèrent, fiévreuses et éperdues, sur le front de la jeune femme, sur ses paupières à demi closes, sur sa bouche entr’ ouverte...

« Oh ! que c’est mal ! Laissez-moi, monsieur Gabriel ! C’est très mal !...» murmura Eugénie palpitante ; et, s’arrachant des bras du jeune homme.