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Californie, couchant dans les garnis à la nuit, et quelquefois dans les fours à chaux, et prenant part, avec ses semblables, à d’interminables parties de bouchon sur les boulevards, près des barrières. Il portait la casquette grasse en arrière, les pantoufles de tapisserie et la courte blouse blanche. Quand il avait cinq sous, il se faisait friser. Il dansait chez Constant, à Montparnasse, achetait deux sous, pour le revendre quatre, à la porte de Bobino, le valet de cœur ou l’as de trèfle servant de contremarque, ouvrait à l’occasion une portière de voiture, entraînait des rosses au marché aux chevaux. Tous les malheurs ! Il tira au sort et amena un bon numéro. Qui sait si l’atmosphère d’honneur qu’on respire au régiment, si la discipline militaire, ne l’auraient pas sauvé ? Repris, dans un coup de filet, avec de jeunes rôdeurs qui dévalisaient les ivrognes endormis sur les trottoirs, il se défendit très énergiquement d’avoir pris part à leurs expéditions. C’était peut-être vrai. Mais ses antécédents tinrent lieu de preuve, et il fut envoyé pour trois ans à Poissy. Là, il fabriqua de grossiers jouets d’enfant, se fit tatouer les pectoraux et apprit l’argot et le Code pénal. Nouvelle libération, nouveau plongeon dans le cloaque