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Je laissais choir enfin un monstrueux pâté.

C’était affreux !

                        Pourtant, plein d’une angoisse énorme.
Le lendemain, avec ce manuscrit informe,
Quand je me présentais devant mes bons parents,
Ils prenaient le papier, ouvraient les yeux tout grands,
S’écriaient : « C’est superbe ! » et, sans dédains ni moues,
Embrassaient tendrement leur fils sur les deux joues.
Oui, ma page illisible, ils semblaient l’admirer.
Et l’on ouvrait l’armoire, et j’en voyais tirer
Des trésors, un tambour, un fusil à capsules !
Et je m’en emparais, joyeux et sans scrupules,
Ne sachant pas alors — pour l’enfant tout est beau —
Pourquoi mon père avait toujours un vieux chapeau
Et pourquoi la maman, sainte parmi les saintes,
Portait des gants flétris et des jupes reteintes.

Aux humbles, comme moi nés dans la pauvreté,
Je souhaite d’abord avec sincérité,
Quand la nouvelle année entreprend sa carrière,
Le pain quotidien de la vieille prière ;
Et puis, pour qu’ils ne soient jamais trop malheureux,
Je leur souhaite encor de bien s’aimer entre eux.