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« Je geins ; ― et vous pensez peut-être, au bout du compte,
Que je fais ma journée et que je vis sans honte,
Et qu’il en est beaucoup dont le sort est plus dur.
Donc, vous allez hausser les épaules, bien sûr,
Quand vous saurez, monsieur qui me payez la goutte,
Pourquoi, par-dessus tout, mon métier me dégoûte.
Mais tant pis !… Vous avez voulu causer.. Causons.

« Eh bien, quand je chemine, en toutes les saisons,
Par la ville, encagé dans mes placards, je songe
Que, les trois quarts du temps, je colporte un mensonge,
Que je fais réussir quelque sale trafic,
Que je sers, en un mot, à tromper le public…
Riez si vous voulez… Mais, vraiment, c’est trop bête
D’emprisonner un vieux bonhomme au cœur honnête,
N’ayant qu’un tort, celui d’avoir eu des malheurs,
Entre deux monstrueux boniments de voleurs.
Ah ! la publicité, la réclame, l’affiche !
Mon cher monsieur, mais c’est avec ça qu’on se fiche
De nous ! C’est avec ça qu’on perd le populo !…
Tenez ! le mois dernier, j’avais sur mon tableau
L’annonce d’un journal, qui, sept fois par semaine,
Vend à tous pour un sou de colère et de haine,
Et qui, dans les faubourgs, déverse, chaque soir,