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Tout lui rappelle ici les désastres célèbres.
Être proscrit, c’est plus qu’être orphelin et veuf !
Ce drapeau qu’il entend craquer dans les ténèbres,
Mieux vaut ne pas le voir, car c’est un drapeau neuf !

Alors pris d’une fièvre ardente, il remercie
La consigne qui l’a près d’un canon placé,
Et, comme fit, dit-on, l’Empereur en Russie,
Pose son front brûlant sur le bronze glacé.

Tout à coup, le soldat tressaille et devient pâle,
Car il vient de s’entendre appeler par son nom ;
Et cette voix profonde et grave comme un râle,
Cette voix qui lui parle, elle sort du canon :

— Enfant, ne pleure pas. Espère et patiente !
Ce vent qui vient souffler dans ma bouche béante
M’arrive du côté du Rhin ;
Il me dit que là-bas l’on attend et l’on souffre,
Et c’est comme un écho d’Alsace qui s’engouffre
Et qui murmure en mon airain.

J’entends les moindres bruits que cet écho m’apporte,
Le vieux maître d’école a beau fermer sa porte