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Un soldat se tordant par terre et qui râlait,
Le soldat que mon sabre avait percé, le même !…
Me sentant pris pour lui d’une pitié suprême,
Je me mis à genoux, voulant le secourir :
Mais il me dit : « Il est trop tard… Je vais mourir…
Vous êtes officier… gentilhomme peut-être !…
— Oui. Que puis-je pour vous ? – Seulement me promettre
De renvoyer ceci, dit-il, en saisissant
Un médaillon caché dans sa poitrine en sang,
À… » Mais son dernier souffle emporta sa pensée ;
Le nom de son amante ou de sa fiancée
Par le pauvre Français ne fut pas achevé.
En voyant un blason sur le bijou gravé,
Je l’emportai, gardant pour plus tard l’espérance
De découvrir parmi la noblesse de France
La femme à qui revient ce legs du soldat mort.
Le voici, gardez-le ; mais jurez-moi d’abord,
Si la mort ne doit pas ici me faire grâce,
Que vous accomplirez ce devoir à ma place. »

Et sur le médaillon offert par l’étranger
Irène reconnut le blason de Roger.
Alors, le cœur tordu d’une douleur mortelle :
« Je le jure, monsieur. Dormez en paix ! » dit-elle.