Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/280

Cette page n’a pas encore été corrigée

Évoquait les combats fameux, la Grande Armée,
Les aigles scintillant dans la rouge fumée,
Et, dominant de loin la guerre et son horreur,
Là-bas, sur le coteau, son père, l’Empereur,
Dans un ciel triomphal où plane une Bellone ;
Et, la nuit, il voyait en rêve la Colonne !

Il en mourait !

                          Un jour que cette obsession
Le torturait avec plus d’obstination,
Pour dompter à tout prix sa pensée orageuse,
Le duc se fit seller une bête ombrageuse,
Un barbe très rétif, que nul n’osait monter.
Hors de Vienne, il le fit galoper et trotter,
Et sur les grands chemins alors couverts de neige
Il plia l’animal aux travaux du manège.
Tout le jour il courut ainsi. Le cavalier,
A force de fatigue, enfin put oublier
Le glorieux souci dont son âme était pleine.
Mais, s’étant arrêté, le soir, dans une plaine,
Au moment où le froid soleil de la saison
Tombait, rouge et brumeux, derrière l’horizon,
Il ne reconnut pas le morne paysage.
Il s’était égaré. Lui soufflant au visage,