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Nos petits fantassins, en colonne serrée,
S’avançaient lentement, commandés par Suchet ;
Et, dans cet ouragan formidable, on marchait :
— Car, pour vaincre, il fallait prendre cette bourgade.

Ce fut à Walhubert d’enlever sa brigade,
À Walhubert, à qui l’Empereur a souri !

« En avant ! » commanda le héros.
                                               À ce cri,
D’un effort furieux ses bataillons partirent ;
Et par un feu nourri les Russes répondirent ;
Et comme Walhubert, joyeux, caracolait,
Poitrine au vent et sabre à la main, un boulet
Le jeta sur le sol, la cuisse fracassée.

La colonne d’attaque était trop bien lancée :
Elle ne cessa pas pour si peu de courir.
Mais, comme des soldats venaient le secourir,
L’intrépide blessé les écarta d’un signe,
Et dit sévèrement :

                            « Eh bien ! Et la consigne !
Qu’on me prenne un drapeau russe pour mon linceul !…
Grenadiers, à vos rangs !… Je peux mourir tout seul !… »