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Qui repose, parmi la chevelure brune,
Et que vient effleurer un doux rayon de lune,
Il s’arrête, il hésite ; et le rude seigneur
Sent son amour en lui plus fort que son honneur.
Son oreille pourtant ne peut s’être trompée.
— Guntz voulut prendre alors conseil de son épée,
Celle que ses aïeux portaient de père en fils.
Il la déposa donc devant le crucifix,
Sur le prie-Dieu, sortie à moitié de sa gaine,
Et lui dit :
                       « Mon épée, ô ma bonne africaine !
Toi que j’ai retrempée au sang du Sarrasin,
Qu’en dis-tu ? Mon épouse a nommé le voisin
Dans son rêve ; et je crois qu’elle m’est infidèle,
Mais je n’en suis pas sûr.Dis, que penses-tu d’elle ?
Je connais ton horreur de toute trahison
Et puis te confier l’honneur de ma maison ;
Ton clair regard d’acier,, amie, est seul capable
De lire dans cette âme innocente ou coupable ;
Tu ne voudrais pas voir dormir auprès de moi
Une femme moins pure et moins fière que toi.
Pour que je lui pardonne ou qu’elle soit frappée,
Juge-la donc ! »
                          Alors, la noble et juste épée,
Qui savait que, malgré qu’elle eût le cœur touché,