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De l’ancienne victoire épouvantable preuve,
Que deux beaux jeunes gens conduisaient près du fleuve
Et semblaient entourer d’un respect filial.

Le roi Sennachérib arrêta son cheval
Et, tout en s’appuyant d’une main sur la croupe,
Longtemps et tout pensif il contempla ce groupe.

Le plus jeune des fils du vieillard étranger
Lui présentait du pain et le faisait manger,
Et l’aîné, le guidant avec un soin servile,
Lui décrivait tout haut les beautés de la ville.
Car, pour le pauvre infirme, errant par les chemins,
L’un avait des regards et l’autre avait des mains.

Le roi remit au pas sa bête reposée ;
Mais en passant la main sur sa barbe frisée,
Il songeait :
                        « Cet esclave a de bons fils. Pourquoi
Suis-je jaloux de lui ? N’en ai-je donc pas, moi ?
Les nombreux descendants de ma race prospère
Entourent de respect leur seigneur et leur père.
Pourquoi de leur amour ne serais-je pas sûr ?
Je les ai faits puissants et riches dans Assur ;
Je leur ai confié d’immenses satrapies ;