Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/147

Cette page n’a pas encore été corrigée

— On ne peut demander de bonheur à la vie
Qu’une minute exquise et sur-le-champ ravie,
Pas plus que ne pourrait, dans l’onde d’un ruisseau,
En se penchant au bord, boire un petit oiseau.
Jouissons du moment heureux, saisissons l’heure,
Sans en attendre une autre aussi bonne ou meilleure,
Satisfaits d’admirer, sans vouloir le saisir,
Ce frêle papillon de l’âme, le désir.


18 juin.

De son calme nouveau mon âme est étonnée.
Jadis, quand revenait le printemps, chaque année,
J’étais triste, et songeais : Encore un de perdu !
Sachant que le bonheur à personne n’est dû,
Résigné, mais cachant une intime souffrance,
Aux matins décevants qui parlent d’espérance
Je m’attachais, j’aurais voulu les ralentir.
Eh bien ! cette fois-ci, printemps, tu peux partir.
J’attends le lendemain sans regret de la veille ;
A tous les jours je trouve une douceur pareille,
Et ne désire plus en suspendre le cours.
Il me semble que c’est au bonheur que je cours
Et vers un horizon tout rose de promesse.