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Alors, vous asseyant pour cueillir un bleuet
Dans l’herbe, et puis un autre, et puis un autre encore,
Vous les avez piqués dans vos cheveux d’aurore ;
Et, les bras recourbés sur votre front fleuri,
Assise dans le vert gazon, vous avez ri,
Et vos joyeuses dents jetaient une étincelle.
Mais pendant ce temps-là, ma belle demoiselle,
Un seul témoin, qui vous gardera le secret,
Tout heureux de vous voir heureuse, comparait,
Sur votre frais visage animé par les brises,
Vos regards aux bleuets, vos lèvres aux cerises.


12 juin.

Il n’y faut pas songer. Quand même dans l’oubli
Mon malheureux passé serait enseveli,
Pourrait-elle m’aimer ? Est-ce que, moi, je l’aime ?…
— Eh ! qu’importe ? A quoi bon se poser ce problème ?
Tout ce que je sais bien, c’est qu’être ici m’est doux,
C’est que j’aime à la voir. Eh bien ! enivrons-nous
De cette bonne vie oisive et paysanne,
Et du plaisir de voir et d’entendre Suzanne.
Le spleen est dissipé, ― c’est là l’essentiel, ―
Et le reste viendra plus tard, s’il plaît au ciel.