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Le bruit d’un camion apportant des tonneaux
De harengs saurs ou bien des caisses de pruneaux ;
Et, le reste du temps, c’était dans sa boutique,
Un calme rarement troublé par la pratique,
Servante de rentier ou femme d’artisan,
Logeant dans ce faubourg à demi paysan.
Ce petit homme roux, aux pâleurs maladives,
Était triste, faisant des affaires chétives
Et, comme on dit, ayant grand’peine à vivoter.
Son histoire pouvait vite se raconter.
Il était de Soissons, et son humble famille,
Le voyant à quinze ans faible comme une fille,
Voulut lui faire apprendre un commerce à Paris.
Un cousin, épicier lui-même, l’avait pris,
Lui donnant le logis avec la nourriture ;
Et, malgré la cousine, épouse avare et dure,
Aux mystères de l’art il put l’initier.
Il avait ce qu’il faut pour un bon épicier :
Il était ponctuel, sobre, chaste, économe.
Son patron l’estimait, et, quand ce fut un homme,
Voulant récompenser ses mérites profonds,
Il lui fit prendre femme et lui vendit son fonds.

— Quand on trouve un garçon pareil, il faut qu’on l’aide
Disait-il.