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Un cercle d’amateurs éblouis l’entourait.
Elle épousa ce beau tyran de cabaret
Dont aucun paysan n’avait voulu pour gendre
Et qui, lorsqu’à sa main elle parut prétendre,
Fit bien quelques façons, mais ne refusa pas,
Sachant les louis d’or cachés dans un vieux bas,
Et les rêvant déjà, transformés en bouteilles.
Toutes ces unions maudites sont pareilles :
La noce, quelques nuits de brutales amours,
La discorde au ménage au bout de quinze jours,
L’homme se dégageant brusquement de l’étreinte
Pour retourner au vin, quand la femme est enceinte,
Les courroux que des mots ne peuvent apaiser,
Et le premier soufflet près du premier baiser.
Puis la misère.
                      Ici l’événement fut pire.
Ce fainéant avait des instincts de vampire.
Ce monstre, le jour même où sa femme accoucha,
— L’huissier ayant saisi le ménage, – chercha
Le moyen d’exploiter encore sa femelle ;
Et, quand il vit son fils mordant à la mamelle,
Il se frotta les mains. Chose horrible ! il fallut,
Pour sauver le vieux toit, la vache et le bahut,
Que la mère quittât son pays, sa chaumière,
Son enfant, les yeux clos encore à la lumière,