Et, comme le devoir paternel le prescrit,
Nous devons lui donner les armes de l’esprit.
Je ne désire pas, moi, qu’il se fasse prêtre.
Oh ! qu’il soit bon chrétien, que la foi le pénètre,
Qu’il aime et qu’il espère enfin, et qu’il soit tel
Qu’un lys pur qui fleurit à l’ombre de l’autel !
Mais, si j’en puis juger par sa petite enfance,
J’aimerais mieux ― que Dieu pardonne mon offense !
Que la vocation de grâce lui manquât,
Car pour le sacerdoce il est trop délicat.
C’est en souffrant qu’il faut que le pasteur travaille
Pour ses brebis. Il faut qu’il se lève et qu’il aille
Par la nuit, bien avant le petit point du jour,
Sous la bise, à travers les terres de labour,
Emportant dans un coin du manteau le ciboire,
Et cherchant, tout au fond de la campagne noire,
A découvrir enfin au douteux horizon
La lueur qui trahit la funèbre maison
Où quelque agonisant, quand il arrive à l’heure,
Lui montre en blasphémant sa famille qui pleure,
Son foyer sans fagot et sa huche sans pain.
Puis, avec l’eau bénite et la bière en sapin,
Il faut le lendemain qu’il revienne et qu’il donne
Au mort une prière, aux vivants son aumône,
Et, s’il n’a pas d’argent, qu’il en trouve, et qu’il ait
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