Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t1, 1885.djvu/166

Cette page n’a pas encore été corrigée

Si ce miracle advint, c’est que tu t’y mêlas,
C’est que tu l’accomplis sans le savoir, Enfance !
C’est qu’une sympathique et douce connivence
S’installe entre ta grâce et la grâce d’avril ;
C’est qu’un enchaînement adorable et subtil
Comme lui t’embellit de charme et de surprise,
Fait ton rire semblable aux chansons de sa brise
Et l’or pâle de ta chevelure pareil
Aux rayons étonnés de son jeune soleil !

Car de longs mois, depuis cette nuit de novembre
Où près des deux vieillards et dans la vieille chambre,
Confiant, protégé par leur regard ami,
Pour la première fois l’enfant avait dormi,
De bien longs mois, de bien doux mois, toute une année
D’extase stupéfaite et de joie étonnée
Avait passé, bien chère et trop courte pour eux.

Et dès le lendemain de ce jour bienheureux
Ils avaient entrepris leur délicat ouvrage.
D’abord ils avaient craint les dangers du sevrage ;
Mais tout semblait venir en aide à leur dessein.
Rejeton du malheur, né sur un maigre sein
Avare de son lait comme de sa tendresse,
Angelus, élevé sans soin et sans caresse,