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qu’ils étaient revenus dans l’intention de profiter de l’élévation du terrain pour examiner l’horizon.

Quelques-uns mirent pied à terre, d’autres se mirent à caracoler dans toutes les directions, comme s’ils cherchaient à reconnaître les lieux. Heureusement pour les trois amis, l’herbe dans laquelle ils étaient cachés ne servait pas seulement à les dérober aux regards des barbares, mais elle opposait encore un obstacle qui empêchait les chevaux, non moins sauvages et non moins farouches que les maîtres, de les fouler aux pieds dans leurs bonds rapides et irréguliers.

À la fin un Indien au regard sombre et à la taille gigantesque, qui, par son air d’autorité, semblait être le chef, appela ses principaux compagnons autour de lui, et ils tinrent conseil entre eux sans descendre de cheval. Paul Hower, en levant les yeux, ayant vu l’air féroce et menaçant de la troupe qui s’augmentait à chaque instant de quelque nouvelle figure, encore plus repoussante s’il était possible que les premières, ne put s’empêcher par un mouvement machinal, de porter la main sur son fusil, et le tirant de dessous lui, il commença à l’apprêter pour pouvoir s’en servir au premier moment. La jeune femme, par un mouvement tout aussi naturel à son sexe, enfonça sa tête dans l’herbe, le laissant libre de suivre l’impulsion de son caractère bouillant ; mais le vieillard plus prudent lui dit à l’oreille d’une voix ferme :

— Le bruit du ressort d’une arme à feu est aussi familier à ces misérables que le son de la trompette l’est au soldat. Baissez le fusil, baissez le fusil, vous dis-je ; si la lune vient à donner sur la platine, il sera infailliblement aperçu par ces diables incarnés, dont les yeux sont aussi perçants que ceux du serpent le plus noir. Le moindre mouvement à présent ne peut manquer d’attirer sur nous une grêle de flèches.

Le chasseur d’abeilles obéit, en cela qu’il resta immobile et qu’il garda le silence. Mais il faisait encore assez clair pour que son compagnon pût se convaincre, d’après les sourcils froncés, et le regard menaçant du jeune homme, que, s’ils étaient découverts, la victoire pourrait coûter cher aux sauvages. Voyant que ses conseils n’étaient point écoutés, le Trappeur prit ses mesures en conséquence, et il parut attendre le résultat avec un calme et une résignation tout à fait caractéristique.

Pendant ce temps les Sioux (car la sagacité du vieillard n’avait pas été en défaut en donnant ce nom à cette horde sauvage)