Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/423

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la couleur de leur peau. Il engageait ses jeunes guerriers à regarder les mains des Longs-Couteaux. Elles n’étaient point vides, comme celles de mendiants affamés ; elles n’étaient pas non plus remplies de marchandises, comme celles des fripons de marchands. Ils étaient des guerriers comme eux, et ils portaient des armes dont ils savaient faire un noble usage. Ils étaient dignes d’être appelés frères.

Ensuite il dirigea l’attention des Indiens sur le chef des étrangers. C’était un fils de leur grand-père blanc. Il n’était pas venu dans la Prairie pour effrayer les buffles et les chasser de leurs pâturages, ni pour chercher le gibier des Indiens. Des méchants lui avaient enlevé une de ses femmes ; et c’était sans doute la plus obéissante, la plus douce et la plus charmante de toutes. Ils n’avaient qu’à ouvrir les yeux pour voir que ce qu’il disait devait être vrai. À présent que le chef blanc avait retrouvé sa femme il allait retourner en paix dans son pays. Il dirait à son peuple que les Pawnies étaient justes, et les deux nations vivraient en bonne intelligence. Tous ses guerriers souhaitaient aux étrangers un heureux retour dans leurs habitations. Les Loups savaient tout à la fois recevoir leurs ennemis, et ôter les ronces du sentier de leurs amis.

Le cœur de Middleton avait battu fortement, quand le jeune partisan[1] ou chef avait fait allusion à la beauté d’Inez, et il n’avait pu s’empêcher de jeter un regard sur sa petite troupe d’artilleurs, comme pour lui dire de se tenir prête au premier signal ; mais à partir de ce moment le jeune et brave Pawnie parut oublier entièrement qu’il eût jamais vu un objet aussi séduisant. Ses sentiments, s’il en éprouvait à cet égard, étaient concentrés au fond de son âme, et rien n’annonçait sur sa figure la contrainte qu’il s’imposait. Il prit chaque guerrier l’un après l’autre par la main, sans oublier le dernier soldat ; mais aucun de ses regards ne se dirigea vers les jeunes amies. Il avait veillé à ce que rien ne leur manquât pour la route, avec un soin qui n’avait pas manqué d’exciter quelque surprise parmi ses jeunes compagnons ; ce fut la seule marque d’intérêt qu’il laissa échapper, et rien dans tout le reste de sa conduite ne put éveiller le moindre

  1. Les Américains ont adopté plusieurs mots qui appartiennent réciproquement au langage les uns des autres. Ainsi, « squaw, papoose ou enfant, wigwam, » etc., etc, quoiqu’il soit douteux qu’ils appartiennent à aucun dialecte indien, sont d’usage entre les Peaux-Rouges et les blancs dans leurs rapports. Plusieurs mots ont été adoptés du français dans ces prairies, partisans, braves, sont du nombre.