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— Ce spectacle est terrible ! s’écria Middleton en serrant entre ses bras Inez toute tremblante. Dans un pareil moment ! d’une telle manière !

— Les portes du ciel sont ouvertes à tous ceux qui croient dans la sincérité de leur cœur, dit Inez cherchant une consolation dans la religion.

— Cette résignation me fera perdre l’esprit ! s’écria Middleton ; mais nous sommes des hommes, et nous ne renoncerons pas à la vie sans avoir fait des efforts pour la conserver. Eh bien ! mon brave et courageux ami, monterons-nous à cheval et essaierons-nous de traverser les flammes, ou resterons-nous ici pour voir périr, de cette mort horrible, celles que nous aimons, sans avoir essayé de les sauver ?

— Je suis d’avis d’essaimer, et de nous envoler avant que la ruche soit trop chaude pour que nous puissions y rester, répondit le chasseur d’abeilles à qui l’on comprend bien que s’adressait Middleton presque au désespoir. Allons, vieux Trappeur, continua-t-il, vous devez convenir que ce n’est pas là le moyen de sortir de danger. Si nous restons ici plus longtemps, nous serons comme les abeilles qu’on voit étendues autour de la paille brûlée dont on s’est servi pour enfumer leurs ruches afin d’en tirer le miel. Vous pouvez déjà entendre le bruit des flammes, et je sais par expérience que quand l’herbe des Prairies est une fois bien allumée, il faut avoir de bonnes jambes pour courir plus vite que le feu.

— Croyez-vous, dit le vieillard en montrant avec dérision les grandes herbes desséchées qui les entouraient, que le pied d’un homme puisse courir plus vite que le feu sur une telle arène ? Si je savais seulement de quel côté sont ces mécréants !

— Qu’en dites-vous, ami docteur ? s’écria Paul hors de lui, s’adressant au naturaliste avec cette sorte de désespoir qui fait que le plus fort cherche le secours du plus faible, quand le pouvoir humain est arrêté par la main d’un être plus puissant ; qu’avez-vous à dire ? n’avez-vous pas un avis à donner dans une occasion où il y va de la vie et de la mort ?

Le naturaliste, ses tablettes en mains, regardait ce spectacle terrible avec le même sang-froid que si l’incendie eût été allumé pour résoudre les difficultés de quelque problème scientifique. Distrait de ses réflexions par la question de Paul, il se tourna vers son autre compagnon le Trappeur, dont la physionomie était