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nature en face, et à raisonner sur ce que j’ai appris par ouï-dire. Mais je n’ai jamais fermé mes oreilles aux paroles du bon livre, et j’ai passé bien des longues soirées d’hiver dans les wigwams des Delawares à écouter les bons Moraves lorsqu’ils expliquaient l’histoire et les doctrines des premiers temps au peuple du Lenape. Il était doux d’entendre tant de sagesse après une chasse pénible ! Oui, je le trouvai bien doux, et bien souvent je repassais ce qu’ils avaient dit avec le Grand-Serpent des Delavares dans les heures plus paisibles de nos embuscades, soit que nous fussions à la piste de quelque troupe de Mingos, ou bien aux aguets pour chasser un daim d’York. Je me rappelle avoir entendu dire plus d’une fois que la Terre-Sainte était autrefois aussi fertile que les rives du Mississipi, que les grains et les fruits y venaient en abondance, mais que la main du Seigneur s’étant retirée, elle n’est plus remarquable que par sa stérilité.

— Il est vrai ; mais l’Égypte, et je puis même dire une grande partie de l’Afrique, fournissent des preuves encore plus frappantes de cet épuisement de la nature.

— Dites-moi, reprit le vieillard, est-il vrai que dans cette terre de Pharaon il subsiste encore des bâtiments qui, pour la structure, peuvent être comparés aux montagnes de la terre ?

— Tout aussi vrai qu’il l’est que la nature ne refuse jamais des incisives aux animaux, mammalia, genus

— C’est prodigieux ! et cela prouve combien il doit être grand Lui, puisque ses misérables créatures peuvent accomplir de semblables merveilles. Il a fallu bien des bras pour finir un pareil édifice ; oui, et des bras doués de force et d’adresse en même temps ! La terre nourrit-elle encore une race pareille à cette heure ?

— Loin de là : la plus grande partie du pays est un désert ; et sans une grande rivière le reste ne serait pas plus habité.

— Oui, les rivières ont des dons rares pour ceux qui labourent la terre, comme le peut voir quiconque fait un long voyage entre les Montagnes Rocheuses et le Mississipi. Mais comment expliquez-vous ces changements qui surviennent sur la face de la terre et cette décadence des nations, vous autres gens des écoles ?

— Il faut l’attribuer moralement…

— Vous avez raison : c’est leur morale, c’est-à-dire leur perversité, leur orgueil, et surtout leur folle prodigalité qui a tout