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voies au commerce intérieur et à la navigation de l’océan Pacifique ; et, si le temps ou la nécessité amenait une division paisible de ce vaste empire, elle nous assurait un voisin qui parlerait la même langue que nous, qui aurait la même religion, les mêmes institutions, et, il faut aussi l’espérer, les mêmes principes de droit politique.

Quoique la cession eût été faite en 1803, le printemps de l’année suivante s’ouvrit avant que la prudente discrétion de l’Espagnol qui administrait la province au nom de son souverain voulût permettre la prise de possession, ou même l’entrée des nouveaux propriétaires. Mais, à peine les formalités de la cession eurent elles été accomplies, et le nouveau gouvernement reconnu, que des essaims de ce peuple turbulent, qui s’agite sans cesse aux extrémités de la population américaine, s’enfoncèrent dans les bois qui bordent la rive droite du Mississipi, avec la même persévérance et le même courage insouciant qui avaient guidé un si grand nombre d’entre eux dans leur pénible émigration des pays atlantiques à la rive orientale du Père des fleuves[1].

Le temps seul pouvait effectuer le mélange des nombreux et riches colons de la Basse-Louisiane avec leurs nouveaux compatriotes ; mais la population plus pauvre et plus disséminée de la province supérieure fut presque immédiatement engloutie par le torrent de l’émigration. Cette invasion du côté de l’est était le réveil violent et subit d’un peuple qui s’était imposé une contrainte momentanée, après que le succès avait rendu sa force presque irrésistible. Les fatigues et les périls de leurs premières entreprises furent bientôt oubliés, quand ces contrées immenses et inconnues, se présentant à leurs yeux avec tous leurs avantages réels ou supposés, leur ouvrirent une nouvelle carrière. Les conséquences furent celles qu’on devait aisément prévoir, lorsqu’une occasion aussi attrayante s’offrait à une race habituée depuis longtemps aux entreprises aventureuses, et nourrie dans les périls.

Des milliers des plus anciens habitants de ce qu’on appelait alors les Nouveaux-États[2], s’arrachèrent aux douceurs de la vie paisible

  1. On appelle ainsi le Mississipi dans différentes langues indiennes. Le lecteur se formera une plus juste idée de l’importance de ce cours d’eau, s’il se rappelle que le Missouri et le Mississipi sont regardés comme le même fleuve. Les deux cours réunis forment à peu près quatre mille milles.
  2. Tous les États soumis à l’union américaine depuis la révolution sont appelés nouveaux États, à l’exception de Vermont, qui pouvait réclamer les mêmes droits avant la guerre ; ils ne furent cependant reconnus que plus tard.