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parut d’abord dans tout son éclat, mais les nuages s’amoncelèrent peu à peu, et finirent par s’épaissir assez pour éclipser ses rayons.

La matinée était déjà assez avancée, et le soleil luttait encore contre les amas de vapeurs qui allaient l’obscurcir, quand Élisabeth sortit de son appartement et voulut profiter du beau temps qu’il faisait encore, pour satisfaire sa curiosité en visitant les environs de la maison de son père, avant qu’on se réunît pour le déjeuner. S’enveloppant d’une pelisse pour se garantir du froid, qui, quoique diminué, était encore assez piquant, elle entra dans un petit enclos situé derrière la maison, et qui donnait sur un taillis de jeunes pins, rejetons de vieilles souches dont les troncs avaient été coupés. À peine y était-elle entrée qu’elle reconnut la voix de Richard Jones, qui s’écriait :

— Je vous souhaite d’heureuses fêtes de Noël[1], cousine Bess. Ah ! ah ! je vois que vous êtes matinale, mais je savais que je le serais encore plus que vous. Jamais je ne me suis laissé prévenir par personne pour les souhaits du jour de Noël. Non, ni homme, ni femme, ni enfant, ni grand, ni petit, ni blanc, ni noir, ni peau jaune, ni face cuivrée, ne peut se vanter de m’avoir jamais devancé à cet égard. Mais attendez un moment que je passe mon habit. Vous voulez voir les améliorations qui ont eu lieu pendant votre absence ; il n’y a que moi qui puisse vous les montrer, car c’est moi seul qui en ai fait tous les plans. Il se passera encore une heure avant que le cousin ’Duke et le major aient achevé de cuver les maudits mélanges de mistress Hollister, ainsi rien ne m’empêche d’aller faire un tour avec vous.

Élisabeth se retourna, et vit Richard en bonnet de nuit à la fenêtre de sa chambre à coucher, où la crainte d’être prévenu par quelqu’un dans les souhaits du jour lui avait fait passer la tête en dépit du froid. Elle lui promit en souriant de l’attendre, et, étant rentrée dans la maison, elle en revint tenant en main un papier scellé de plusieurs grands cachets, et trouva M. Jones qui l’attendait à son tour.

— Allons, Bessy, lui dit-il en passant un des bras de sa cousine

  1. En Angleterre et dans les États-Unis, où l’on a conservé une grande partie des usages de la mère-patrie, c’est le jour de Noël que se font les souhaits, compliments et présents qu’on fait en France à la nouvelle année, comme aussi c’est l’anniversaire de la naissance qu’on fête, et non le Jour du saint dont on porte le nom.