bravé les efforts de cinquante hivers. Mais lorsque, tournant la tête, sa figure se trouvait sous l’influence directe de cet astre, ses yeux noirs et vifs annonçaient des passions qui ne connaissaient aucune contrainte, des idées qui étaient aussi libres que l’air qu’il respirait. La taille svelte de miss Grant, qui venait ensuite, et qui était vêtue un peu légèrement pour une nuit si froide, formait un contraste frappant avec le costume sauvage et les membres encore robustes du vieux chef mohican ; et, plus d’une fois, chemin faisant, le jeune chasseur, qui formait l’arrière-garde, quoiqu’il ne fût pas le personnage le moins remarquable du groupe, réfléchit sur la différence que pouvait présenter la figure humaine, quand Louise, dont les yeux rivalisaient avec l’air du firmament, et le vieux John, dont les traits étaient durs et fortement prononcés, se retournaient de son côté pour jeter un coup d’œil sur le bel astre qui les éclairait.
Le ministre fut le premier qui rompit le silence. — En vérité, dit-il au jeune chasseur, c’est une chose singulière de trouver un jeune homme de votre âge visitant une autre Église que celle où il fut élevé, par tout autre motif qu’une curiosité vaine ! Aussi j’éprouve une vive curiosité de connaître l’histoire d’une vie si bien dirigée. Vous devez avoir reçu une excellente éducation, car votre ton et vos manières en sont une preuve évidente. Dans lequel de nos États êtes-vous né, monsieur Edwards, car je crois vous avoir entendu dire au juge Temple que vous vous nommez ainsi ?
— Dans celui-ci, répondit Edwards.
— Dans celui-ci ! répéta M. Grant. Je ne savais qu’en penser, car je n’ai remarqué dans vos discours ni l’accent ni le dialecte d’aucune des contrées des États-Unis que j’ai parcourues. Vous avez sans doute habité constamment quelque ville, car ce n’est que là qu’on peut trouver notre culte observé constamment.
Le jeune chasseur sourit, mais il garda le silence, ayant sans doute des raisons particulières pour ne pas répondre à cette question.
— Au surplus, mon jeune ami, continua le ministre, trop poli pour insister, je me félicite de vous rencontrer, car votre exemple prouvera, j’espère, la supériorité des principes religieux que nous professons. Vous avez dû voir que j’ai été obligé ce soir de me prêter un peu aux dispositions de mes auditeurs. Le bon